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D'étranges rêveries : Mon univers proche
28 février 2005

Mon Innamoramento

Avant de commencer quoique ce soit, je pense qu'il serait souhaitable que je me présente, que je présente un peu ma vie, mon univers, ce que j'aime, entre autres …

« J'ai dans ma mémoire mes faiblesses, mais au creux des mains toutes mes forces aussi … mais alors pour vaincre la tristesse, surmonter ses doutes, il nous faut un ami » : l'amie c'est elle …

C'est relativement sceptique que je prends ma plume, que je crée ce blog … Comment vais-je trouver des mots à la hauteur de son sujet, comment vais-je trouver ces mots « qui nous caressent, qui illuminent, qui touchent l'infini » … ? Comment vais-je pourvoir réussir à vous retranscrire les incroyables émotions que Mylène Farmer me procure chaque jour … ? C'est d'ailleurs ici que je vais pour la première fois réellement le faire … Je n'en ai en effet encore jamais réellement parlé, de peur de ne pas en être à la hauteur, même si je ne me fais pas trop d'illusion quant à la qualité de ce que je suis en train de vous écrire …

C'est donc avec mansuétude que je vous demande de me lire …

Mais commençons donc par le commencement :

Longtemps j'étais le petit garçon heureux, drôle et exemplaire … mais au fond de moi, qui pouvait prétendre mon véritable bonheur : cette liesse était hautement périssable … J'avais souvent ces pincements au cœur, ces idées malfamées, ces délires incompris : je me sentais creux. Je ne suis pas entré dans l'univers Farmer par son luxueux portail doré, emprunt d'onirisme et de perles rares gravées sur chacune de ses portes : j'y suis pénétré lentement et inconsciemment, par un labyrinthe de portes toujours plus grandes, toujours plus belles … Je ne me souviens pas de grand chose avant 1999 mais je me rappelle que j'adorais la chanson L'Âme-Stram-Gram … Tous les autres extraits du sublime album Innamoramento (album total inconnu pour moi) me plaisaient bien, je sentais qu'il s'y passait quelque chose de fort, sans savoir quoi pour autant …

Passant dans la somptueuse galerie du doux nom de Auchan, je remarquai soudain qu'une télévision diffusait le Mylènium Tour … Bon, je regarde Optimistique-moi que j'étais content de reconnaître, puis le medley … Mais il fallait maintenant m'en aller et pourtant mes yeux ne parvenaient à quitter ce cadran, et surtout ce visage, ces danses, ces rêves … Bien décidé à prolonger cette sensation d'envoûtement, je décidai de commander le CD du Mylènium Tour pour Noël …

Je l'écoutai aussitôt mais ne ressentais, déçu, rien, à part sur les délicieux cinq singles d'Innamoramento … Dans ma chambre, je décidai de l'écouter à nouveau et c'est alors que ce sentiment se passa : une porte s'entrouvrait sur ce monde fascinant … Le boîtier semblait d'ailleurs me conforter dans mon opinion : j'entrai bel et bien en quelque chose … mais quoi ? Le livret photo me paralysait par sa beauté et (étrangement) son odeur … Je tentais de faire correspondre un costume à une chanson mais le résultat fut bien loin de la subtile réalité … Contrairement à ce qui peut se passer lorsque l'on écoute plusieurs fois une chanson, je ne m'en lassais pas, chaque chanson semblait vouloir se libérer … Chaque note effleurait ma peau, je sentais le souffle de sa voix me donner des frissons … Puis, pour mieux comprendre ce qu'elle disait si bien, je tentais de consigner les paroles des chansons. Surtout pour Pas le temps de vivre et Dernier Sourire car ces deux chansons me laissaient de marbre, bien loin de leur ensorcelante richesse … Je peinais cependant à tout comprendre et le texte que j'écrivis est finalement assez éloigné du véritable texte de Mylène … Cependant, encore une fois, je sentais que le contact entre ma plume et le papier n'était pas comme à l'accoutumée … Peut-être la feuille était honorée de recevoir de si beaux mots … En effet, ces textes approximatifs en main, je réécoutai ces deux chansons et ses larmes chantées semblaient couler sur le papier … Un instant magique se passait, je le sentais bien … Je ressentais cet « émoi devant les puissances du Dedans » … Et cet état de grâce ne me quitta plus … Je pense que c'est vraiment à ce moment que j'ai réellement compris que peut-être ce pincement au cœur éprouvé de temps à autres n'était qu'une passion qui ne demandait qu'à éclore, me rendant fou et aliéné, comme les marins, dans l'Antiquité, charmés par les chants de sirènes …

Dans la forme, je suis resté le désormais jeune homme toujours joyeux et incisif, mais au fond de moi, j'ai senti naître un fond se cachant derrière ma forme délurée … J'ai senti toute une culture littéraire et plus généralement artistique à développer au sein de toutes ces chansons …

« Finalement, avec les villes comme les êtres, on ne communique vraiment que par des blessures et par des rêves » dit-elle dans son texte sur Prague … J'ai en effet l'impression que cette passion naissante m'a permis de comprendre qu'au plus profond de moi-même, en cet éveil naissant, se cachaient nombreuses fêlures qui pouvaient s'avérer dangereuses … J'ai compris que finalement peu importait le nombre exact de rires que j'avais déjà éprouvés mais comptent seulement ceux qui m'apportent encore un léger sourire … Peu importe le nombre de blessures qu'a subi mon corps mais le nombre de cicatrices … « Délivre-moi de mon sang, d'un espoir, car en moi guette une silence sans fard, un nulle part … »

Sous son apparence poétique, douce et légère, les textes de Mylène cachent une puissance incroyable, comme un souffle qui parviendrait à vous isoler sur un fil tendu et instable, qui vous isole du monde environnant et sur lequel ses respirations et ses mots produisent un vent qui pourrait à tout moment vous faire tomber, et peut-être d'un mauvais côté … Car il y a aussi tout une dimension psychédélique dans cet envoûtant univers Farmer, à condition de ne pas s'arrêter au pourpre velours qui recouvre chacune de ses œuvres : « Je voudrais ma dissoudre dans un flacon d'acide … et puis me mutiler et puis voir la chair vive saigner, rougir devant ce terrible homicide » …

Car en effet, mon parcours ne s'arrête pas à ce CD du Mylènium Tour, devant tous ces phénomènes paranormaux observés en réaction à celui-ci sur moi, j'ai bien sûr décidé de plonger tête baissée dans cet univers … au risque de m'y noyer … Il est vrai que celui-ci est si riche qu'il est difficile de s'en défaire … Il y eut donc des étapes dans cette pénétration (à double sens d'ailleurs, car ne s'agit-il pas finalement de mêler notre intimité quotidienne à ces rêves exaltants et enivrants par leur capacité à nous faire voyager vers des horizons nocturnes ou crépusculaires) …

Dans le mois d'avril, je découvris le Live à Bercy 96, puis suivirent les clips magistraux, les albums uns à uns, la vidéo du Mylènium Tour, le visionnage puis aussitôt l'achat du Concert 89, le livre Lisa-Loup et le Conteur …

Il est étonnant de remarquer que chaque fois que l'on s'enfonce un peu plus dans son univers, l'on découvre d'autres œuvres foisonnantes (Primo Lévi, Edgar Poe, Baudelaire, Egon Schiele, Luc Dietrich, Emily Dickinson pour ne citer qu'eux ...). Au risque de manquer de souffle, on replonge à chaque fois de nouveau mais tous ces univers périphériques enrichissent et permettent de faire respirer tous ces mondes parallèles afin de leur procurer une fraîcheur toujours intacte …

D'ailleurs, certaines chansons sont pour moi, lorsque je les découvris, d'une violence si extrême qu'il fallait absolument que je les arrête (pensée pour Psychiatric et Agnus Dei). L'alliance Farmer/Boutonnat peut, par sa force, faire basculer à n'importe quel moment vers un état très instable … Ce voyage dans tout cet univers est donc riche mais peut aussi s'avérer périlleux …

Tous ces multiples atours de l'œuvre foisonnante de Mylène m'ont également apporté une émotivité et une sensibilité que je ne me connaissais pas auparavant … J'ai découvert aussi son regard, si percutant et dérangeant de son impertinence, par son mélange de folie, d'insouciance, d'écorchure et de puissance … Aussi fasciné par son regard sur le monde, cette vision désabusée, sombre, « désenchantée » pour reprendre ses mots …

On pourrait dire aussi qu'en quelque sorte, Mylène est un Soleil … mais un soleil noir, avec tout ce que cela implique … Un soleil un peu tel celui que l'on pouvait observer lors de la fameuse éclipse, rayonnant de noirceur … car en effet, la principale clef qui anime Mylène à mes yeux est le paradoxe … comment peut-elle rayonner dans tout cet univers de noirceur … ? Comment peut-elle faire un succès aussi incroyable avec des textes si désabusés (« Tous mes idéaux : des mots abîmés ») … ? Les polarités s'inversent continuellement, et créent les joyaux les plus purs par leur caractère unique et inimitable …

De même pour les musiques de Laurent Boutonnat qui se révèlent à fleur de peau et que l'on reconnaît aussitôt …

Selon moi, aujourd'hui, Mylène est une poète … C'est étrange mais je ne le considère plus comme une chanteuse mais réellement comme une poète, intemporelle, inhumaine d'une certaine façon même si ce qui me touche est finalement une forme d'humanité … Ses mots enrobent mon cœur pour mieux le faire saigner (« De nature innocente on manie l'élégance et d'une main experte d'un glaive l'on transperce »), pour mieux le faire réfléchir sur la condition humaine, sur les élans qui poussent à agir, qui poussent à se dévoiler comme je le fais ici pour la toute première fois … Alors bien sûr, cette poète mystique écrit, compose, joue dans ses clips, pose pour les photographes … mais cela ne change rien à ma vision d'elle … Tous ces contours sont comme des filtres, des révélateurs de la beauté verbale … Le texte est la perle rare, protégée par tous ces atours, enrobée d'une musique qui vous aide à entrer en osmose avec le bijou, les clips et les chorégraphies sont en quelque sorte l'enrobage de tout ceci … comme le papier cadeau, la pellicule protectrice … le voile de pureté …

Pour participer à la recherche de cet osmose, le texte s'appuie sur des sensations que l'on peut ressentir en écoutant celui-ci : « Au vent que je devine mes lèvres éperdues s'offrent des noces clandestines » …

Mes moments privilégiés avec les mots de Mylène et la musique de Laurent Boutonnat sont les soirées … quand la nuit est tombée … Aussitôt, que j'entende ou non leur musique, celle-ci m'envahit … Alors je prends mes écouteurs et j'écoute … je laisse chaque son s'immiscer en moi, et le même sentiment se produit à chaque fois … une sorte de communion, d'unité, d'unisson … Ses mots et mon esprit, et mon imaginaire, ne font plus qu'un, bercés par la musique parfois violente, parfois douce émotive … « Dis-moi les mots qui rendent ivres » Je m'accroche à chaque mot, chaque syllabe pour déambuler toujours plus lentement dans les rues, en observant l'effet de la lune sur les ombres qui volent le long des murs …

Voilà en quelque sorte une infime partie de mon histoire farmerienne …

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